Les groupes radicaux et les individus radicalisés sont souvent confondus comme étant tous violents et à risque de commettre des actes de terrorisme. Les radicaux sont définis comme étant des individus qui soutiennent ou justifient le terrorisme, et parfois, ils expriment le désir de s’engager dans des actes radicaux de violence. Cependant, très peu d’études se sont concentrées sur ce qui différencie les radicaux violents, qui commettent des actes de terrorisme, et ceux qui n’en commettront jamais. En effet, plusieurs événements catastrophiques et tragiques commis par les terroristes ont mené à des accusations contre des agences de surveillance des réseaux sociaux pour ne pas avoir identifié les profils de ces individus avant les événements. En effet, il est du devoir des gouvernements et des agences de cybersurveillance de veiller sur la sécurité de tous et d’identifier ces comptes à risque. Cependant, comment distinguer les individus publiant, partageant ou suivant des pages de groupes radicaux des terroristes qui passent à l’acte? Cette question est pertinente surtout lorsqu’on considère que moins de 1% des individus considérés comme radicaux passent réellement à l’acte.
Afin de mettre en lumière ce phénomène et de mieux diriger la surveillance des radicaux, les chercheurs Wolfowicz, Perry, Hasisi et coll. (2021) ont décidé d’explorer, à travers l’étude de profils Facebook de terroriste ayant commis des actes de terrorisme en Israël, comment des mesures au niveau des médias sociaux peuvent servir à différencier les radicaux qui ne sont pas violents des terroristes.
Pour ce faire, les chercheurs ont analysé l’activité des comptes Facebook d’un groupe de terroristes avec un groupe contrôle d’individus considérés comme radicaux, mais n’ayant pas commis d’actes de violence. L’étude s’insère précisément dans le cas de la hausse importante d’actes de terrorisme en Israël de 2014 à 2018. En ce qui concerne le moment de collecte des données, au lieu de sélectionner un temps précis pour l’ensemble de l’échantillon, ils ont décidé d’observer les activités des comptes Facebook des participants 100 jours avant le passage à l’acte violent, et 100 jours pour les dates similaires pour le groupe contrôle. Ils ont alors effectué différentes analyses : descriptives, multivariées et une régression logistique.
Les principales conclusions de l’étude :
1) Les terroristes sont plus susceptibles de publier des articles à propos d’une attaque terroriste commise par un ami dans le passé.
2) Les terroristes s’engagent et partagent plus de contenu, comparativement aux radicaux non violents qui s’engagent dans des publications plus textuelles.
3) En ce qui concerne les études sur le sujet, les approches de détection automatisée doivent intégrer des facteurs comportementaux afin d’améliorer la précision des résultats et éviter les faux positifs.
Cette étude contient évidemment des limites, parmi celles-ci, la principale limite étant que les résultats et les conclusions portent uniquement sur une étude de cas, Israël, et a été réalisée sur Facebook. Pour généraliser les résultats, il faudrait que les analyses soient réalisées sur d’autres plateformes avec d’autres échantillons. En bref, cette étude a un apport empirique important et significatif. Comme les chercheurs le mentionnent, il y a beaucoup de faux positifs dans la surveillance des individus radicaux. Cela mène à de la surveillance injustifiée de certains individus et empêche les agences de surveillance de se concentrer sur les réels cas à risque de commettre des actes terroristes. Aussi, bien que les chercheurs valident l’utilisation d’outils automatisés sur les plateformes de réseaux sociaux afin d’identifier des individus à risque, ils précisent et justifient la nécessité de pousser davantage les recherches sur les indicateurs d’individus radicaux violents, afin de concentrer les recherches vers les individus les plus dangereux.