La fraude en ligne peut être définie comme une infraction facilitée par les nouvelles technologies, ce qui signifie que même si cette infraction utilise Internet et d’autres technologies pour faciliter sa perpétration, elle n’en dépend pas exclusivement. En tant que telle, cette définition reconnaît que la fraude peut se produire dans des environnements en ligne et hors ligne. Même si Internet a accru la portée des délinquants et, par conséquent, le bassin de victimes potentielles de fraude, les méthodes de communication traditionnelles, telles que le téléphone, les SMS et la simple communication en face à face, restent des véhicules importants de nombreux cas de fraude.
Les victimes de fraude peuvent être insatisfaites des réponses actuelles de la police et du système judiciaire quant à la fraude. Il est donc impératif de déterminer des mesures visant à améliorer les réponses à la fraude. La lutte contre la fraude en ligne doit être située dans le contexte de la réponse policière à la cybercriminalité de manière plus large. La police est généralement mal équipée pour réagir efficacement à la cybercriminalité, ce qui se reflète dans la perception négative qu’ont les victimes de ces types d’infractions en ce qui a trait à leur traitement.
En ce qui concerne la fraude, des obstacles supplémentaires ont été relevés. Les victimes sont généralement incapables de reconnaître leur victimisation, ce qui contribue à un faible niveau de signalement. Il existe également un large éventail d’organismes capables de répondre à une plainte pour fraude, mais de nombreuses victimes ne savent pas où porter plainte ou ne peuvent pas trouver une agence qui prendra leur plainte.
À ce titre, certains organismes d’application de la loi ont mis en place des unités spécialisées ou des mécanismes de signalement pour lutter contre la fraude en ligne, comme ActionFraud au Royaume-Uni, le Centre antifraude du Canada au Canada et Scamwatch en Australie.
L’existence d’unités de police spécialisées et d’agences de signalement peut être une source utile pour la police et les victimes. Par conséquent, la question repose sur l’avantage de différencier les infractions de fraude en fonction du moyen par lequel elles sont commises. Cassandra Cross, du Queensland University of Technology, a mené des entretiens avec des professionnels de la justice antifraude en Angleterre et au Canada en octobre et novembre 2017.
Les résultats des entretiens présentent un éventail de perspectives sur l’utilité de maintenir une distinction entre les infractions de fraude en ligne et hors ligne. Selon les participants, la fraude est une fraude. Ils ont fait valoir que la distinction n’était pas utile, car la fraude est et a toujours été perpétrée dans des environnements physiques, et cela ne pouvait être ignoré. De plus, l’argument le plus convaincant contre la distinction entre hors ligne et en ligne était centré sur le postulat que le terme « cyber » fait désormais partie de l’activité quotidienne et, à ce titre, cela ne fait aucune différence. La cybercriminalité est également difficile pour les organisations, car la distinction entre la fraude hors ligne et la fraude en ligne n’aide pas leurs activités, et elle est même considérée comme inutile. En ce qui concerne les victimes, les participants ont fait valoir que, quel que soit le moyen utilisé pour commettre la fraude, l’impact sur la victime serait similaire. Cela indique que la distinction en ligne / hors ligne n’est pas un concept utile pour les victimes à la recherche d’une réponse des organisations, et ne modifie en rien les conséquences.
La majorité des participants n’étaient pas favorables à la distinction des infractions de fraude entre les environnements virtuels ou physiques. Au lieu de cela, ils ont perçu cette distinction comme étant arbitraire, étant soit un obstacle ou simplement redondant dans le cadre leur travail. Par contre, moins d’arguments soutenaient la nécessité de différencier la cyberfraude de son homologue hors ligne. Les arguments en faveur de cette distinction tournaient autour de la perception des différents outils nécessaires pour enquêter, de l’environnement politique dans lequel les organisations opèrent actuellement ainsi que d’un besoin perçu d’utiliser des outils d’enquête distincts pour les cas de fraude en ligne.
Pour citer cet article : Cross, C. (2019). Is online fraud just fraud? Examining the efficacy of the digital divide. Journal of Criminological Research, Policy and Practice, 5(2), 120-131.